MIOMANDRE (Francis de). Né à Tours. 1880-1959.
Écrivain, romancier, critique littéraire, et traducteur. Prix Goncourt en 1908. M.A.S. « Francis de Miomandre », titré Le Dernier Jour de la Création.
6 pp. in-8.
F. de Miomandre, dans la rubrique « Le livre à lire » rend compte du roman de M. Edmond Jaloux Le Dernier Jour de la Création. Il souligne d’abord ...que la situation considérable que M. Edmond Jaloux s’est faite dans la critique a fait oublier à beaucoup qu’il est surtout, et avant tout, un romancier. Oubli qui, chez certains, n’est qu’une manœuvre de leur tactique littéraire... Sans doute n’existe-t-il pas, ajoute-il, de critique de la classe de Jaloux et il se propose de tenter de le remplacer ...La production romanesque d’Edmond Jaloux, depuis environ quinze ans est nettement orientée dans un sens spécial. Il a tout à fait abandonné le réalisme (n’en ayant gardé que le respect de la vérité) et il a tenté de créer un monde à lui, qui n’est pas hors de la vie, puisqu’il la subit au contraire, et très douloureusement, mais qui s’évade de ses contraintes matérielles par la pensée et la méditation. Tous les héros de Jaloux vivent leur vie et la contemplent et font effort pour la comprendre. Bien entendu, ils n’y arrivent pas ou seulement à des instants privilégiés (...) Ce sont plutôt des héros que des personnages... Gâtés par le naturalisme et la sentimentalité, nous ne pouvons concevoir ...un personnage qui essaie de s’élever au-dessus de son anecdote individuelle pour la ramener à l’universelle... Régis Boisselat ...aime dans son enfance une femme que, adolescent, il n’a pas l’audace de demander, qu’il laisse prendre par un autre, qu’il regrette ensuite jusqu’à sa vieillesse. Banal, donc éternel (...). Exemplaire très ordinaire d’humanité, artiste médiocre, amant irrésolu, type de velléitaire et de demi-raté, Régis Boisselat n’en est pas moins placé sur un plan supérieur, du seul fait de sa sincérité devant soi-même... Au chapitre XIV, Régis, en proie à la fièvre, discute et écoute une de ces voix, de celles qui parfois surgissent de nous-même ...C’est d’un pathétique plein de mystère et d’angoisse... Mais les très longs moments où les personnages vivent et ne comprennent que par intermittences leur joies, leurs peines, recèlent encore plus d’émotion car apparaît alors ...la terrible détresse de la condition humaine... et ...Il y a quelque chose d’atroce à penser que Régis aurait pu être heureux s’il avait manifesté à temps son désir à la femme qui était faite pour lui. Un gramme de volonté en plus dans la balance de sa décision ! (...) C’est atroce et c’est le Destin...
Francis de Miomandre obtient le Goncourt en 1908 pour son cinquième livre, Écrit sur de l'eau. « Comme cette attribution du prix était inattendue et que personne n'avait lu le livre qui avait été tiré à cinq cents exemplaires aux éditions de la revue Le Feu de Marseille, les articles que la critique lui consacra furent d'une fantaisie désarmante. Le Temps, entre autres, affirma gravement qu'il s'agissait d'une étude de mœurs sur les grands paquebots ! ». Il participe un temps au "Club des longues moustaches" (1908-1911) groupe littéraire informel qui se réunit au Caffè Florian à Venise. Edmond Jaloux, 1878-1949, écrivain et critique littéraire y participera également. Ce fin critique attire l’attention de son temps sur les littératures étrangères modernes et contemporaines, grâce à ses articles. Fondateur de la société de poésie en 1945, Edmond Jaloux s’essaie également au roman.